« On se demandera bien sûr si le monde où nous vivons
est vraiment si renversé qu’il faille toujours le remettre sur pied »
...Robert Musil ‘’l’homme sans qualités" Seuil T1 p 47...

A cette demande, nous répondons
« c’est que, ici maintenant, une fois de plus, il le faut bien ! »

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LES CAMARADES DE CUNEO, PARTIE "PROJET DE DISCUSSION", CUNEO, SEPTEMBRE 1978

lundi 3 janvier 2022

La lutte contre les vitres de séparations des parloirs, pour une plus grande socialité interne et externe, lancée par le BR, publiquement par le groupe interne dans la salle du procès de Turin et définie sans possibilité de vérification aussi bien dans la forme que pour les rapports de force à mettre sur le terrain à l’extérieur, c’est-à-dire les associations de familles de prisonniers communistes (?), d’un côté et l’Organisation communiste combattante Brigades Rouges, de l’autre (formes de lutte et rapports de force internes, externes révélés en fait partiels et insuffisants par rapport à un affrontement général et massifié) menée par une partie (la majeure partie ?) des combattants communistes, contrairement aux différentes analyses économico-politiques qui les diversifient, nous a trouvé politiquement opposés (même dans la reconnaissance de notre faiblesse à proposer des alternatives) à entamer en première personne une lutte d’avant-garde formulée de cette façon, tendant en fait à reléguer au second plan et/ou comme simple instrument de soutien le "reste" du prolétariat prisonnier, une lutte que nous considérons, par rapport à la désarticulation du projet de classe de la prison, sur les objectifs minimaux de la société interne et externe pour tous, mystifiante et instrumentale.

L’ensemble du prolétariat prisonnier, dans cette phase de la prison spéciale, est en difficulté, et pas seulement les communistes combattants. Nous devons faire des médiations avec l’Etat pour l’accessibilité interne sur la base de rapports de force qui sont réellement une expression de la lutte de classe, sinon les médiations ne seront valables que pour quelques révisionnistes, par-dessus la tête de la majorité (le prolétariat prisonnier). On voit donc dans ce cycle de luttes contre les hygiaphones des salles des parloirs (la dernière lutte de l’Asinara contre les structures carcérales sort clairement de la logique brigadiste car elle pose fortement la nécessité d’un mouvement de classe fort à l’extérieur, homogène, massif et combatif, qui sait imposer à l’état les plateformes de revendications aux échéances des luttes ; comme on le voit c’est vraiment une lutte de longue haleine) là où il n’y a pas de bonne foi, une logique révisionniste sans équivoque. Cette forme de lutte tend à l’auto-isolement et à la gestion des rôles appartenant au Parti communiste combattant (à quoi bon faire en sorte que l’association des prisonniers communistes revendique la diversité idéologique entre les prisonniers communistes et les prisonniers de droit commun) avec l’Etat depuis et à partir d’eux-mêmes, laissant ainsi les prolétaires prisonniers à devoir chercher à nouveau C’est leur propre identité dans l’histoire de leurs luttes (et donc pourquoi, au lieu de subir les temps du révisionnisme, ne pas commencer tout de suite) à construire dans cette continuité leur propre programme et formes de lutte.

Camarades prolétaires, la lutte de l’avant-garde contre les hygiaphones doit être considérée dans son essence comme le droit des combattants communistes à lutter contre les conditions d’emprisonnement dans lesquelles ils sont maintenus ; mais il s’agit aussi et surtout d’une condition générale qui concerne des dizaines de milliers de prolétaires, des prisons et sections psychiatriques des prisons, des prisons pour mineurs et des prisons spéciales, dont les échéances et les formes de lutte ne peuvent être mûries, théorisées et expérimentées que par le prolétariat prisonnier en première personne sur ses propres besoins matériels et politiques, pour le pouvoir communiste. (...) Depuis cette prison, en janvier de cette année, nous avons déclaré ce qui suit, qu’à un moment où l’exécutif avait de graves difficultés budgétaires dans son « bilan », 400 milliards de lires ont été alloués à la restructuration des prisons et qu’en six mois seulement, les prisons dites spéciales s’étaient remplies de 2000 prisonniers super-dangereux. Aujourd’hui, nous savons que, en plus d’avoir achevé la restructuration (dans le domaine particulier dont nous parlerons plus loin), elle a en fait clairement dénoncé ce qu’est aujourd’hui sous les yeux de tous, c’est-à-dire une diminution des comportements subversifs et une baisse drastique des évasions, armées ou non, qui avaient toute l’année 1976. Camarades, avec tous les arguments analysés possibles dont nous disposons, nous voulons faire un bref survol du cas de "l’Italie", ceci pour contrer ceux qui "affirment" que la crise actuelle est une crise cyclique ( !) mais que cette "fois" le capital est tellement mal réduit qu’il est putrescent et dépourvu de toute possibilité de battre l’urgence révolutionnaire. (...) Au sujet de la situation carcérale, i est nécessaire de poser la question de manière claire et directe au niveau des choses à constituer. C’est parce qu’elle permet aux sujets politiques de classe, et nous sommes parmi eux (avec une bonne tranquillité d’esprit de ceux qui voudraient faire taire la subjectivité de classe et la mémoire de ses luttes) de mettre sur la table les problèmes qui concernent les intérêts politiques des prolétaires prisonniers pour leur solution. Le problème que nous posons comme principal selon les intérêts du prolétariat prisonnier, raisonné et mûri en dix ans d’expériences de lutte spontanée, de masse et d’avant-garde, pour sa recomposition politique avec le reste du prolétariat, et donc, pour la construction d’une organisation de classe globale (pour ce qui est du processus révolutionnaire en Italie) est le suivant : ce secteur de classe (de plus en plus quartier métropolitain) a besoin de vivre à l’extérieur, à travers ses véritables avant-gardes politiques de classe, avec la mémoire concrète de l’histoire des révoltes et des luttes organisées à l’intérieur, des moments théoriques et pratiques de synthèse organisée avec le reste du prolétariat métropolitain qui à l’extérieur exprime l’antagonisme de pouvoir, pour vérifier concrètement son propre degré de recomposition politique de classe. Et il ne suffit pas de dire (comme certains combattants communistes) que ce secteur de classe est potentiellement révolutionnaire : c’est instrumental ; sa nécessité première (c’est-à-dire la vérification de son degré de recomposition) est de l’être en première personne. Le problème est grand et prioritaire ; pour le résoudre nous devons l’affronter du point de vue des intérêts de classe, Nous faisons ce que nous considérons correct (sans aucune crainte de polémique) en vérifiant nos retards par rapport aux luttes des autres avant-gardes politiques de ce secteur, et du secteur dans son ensemble, mais aussi en vérifiant qu’ils sont constamment présents dans le processus de croissance de la conscience combattante et de son antagonisme de classe.

Nous avons raison quand nous disons qu’il est nécessaire de construire une homogénéité interne et surtout externe ; mais il est également vrai (et voici la donnée inaliénable de notre polémique et de notre bataille politique) que personne ne doit se faire l’illusion qu’il peut diriger ce secteur de classe (avec dix ans de lutte de masse et d’avant-garde derrière lui) du haut d’"hypothétiques petits groupes compacts". Les termes de la bataille politique en cours, et que le prolétariat prisonnier (bien que n’avançant pas sur une seule voie), à travers certaines de ses avant-gardes politiques a mené en première personne, sont ceux entre ceux qui font de la propagande sur l’unité entre les camps (un appel entre guillemets rapporté tel qu’il a été lancé par ceux que nous pouvons très sommairement définir comme des "seigneurs de la guerre") et ceux qui comme nous se sont placés de l’intérieur du point de vue de la classe en fonction des besoins matériels et politiques réels de ce secteur, c’est-à-dire se considérant avant tout comme le prolétariat exploité et opprimé, qui cherche à obtenir en leur sein l’homogénéité de classe, luttant contre les "solutions" des crises du capital afin de construire en première personne, avec les avant-gardes communistes combattantes du reste du prolétariat métropolitain, une seule organisation de la classe. Il y a un grand nombre de prolétaires prisonniers qui ont fait mûrir leur antagonisme de classe (malgré le fait que beaucoup de gens jouent à empêcher cette prise de conscience) de l’intérieur de la prison à travers les rébellions et les luttes : ce sont les seuls sujets avec lesquels nous devons travailler pour construire la synthèse, l’organisation, le programme communiste, l’homogénéité politique, la stratégie et la théorie révolutionnaire. Notre travail vise à réévaluer les avant-gardes spontanées de lutte et de politique du PP (ces avant-gardes politiques pour leur autonomie) qui ont mûri, consciemment ou non, leur antagonisme de classe depuis l’intérieur de la prison. Pour nous, ce sont les seuls sujets avec lesquels (nous nous adressons aux communistes révolutionnaires) il est nécessaire de construire un programme communiste et une théorie révolutionnaire. Notre polémique avec les " seigneurs de la guerre à tout prix " n’est donc pas gratuite, mais vise à amener ces camarades à se dépasser dialectiquement pour leur recomposition avec les intérêts généraux du prolétariat. L’homogénéité et l’unité de la classe, entre le prolétariat prisonnier et les restes de la classe antagoniste, qui s’oppose aux déterminations du capital pour les criminaliser, est bonne pour nous dans tous les sens car elle ne présente pas de contradictions entre les solutions organisationnelles et la construction du parti de classe (le seul capable d’historiciser les différents degrés de maturation des besoins du prolétariat métropolitain pour le communisme). Mais l’appel à l’unité entre les camps et c’est tout (c’est-à-dire sans spécification) ne fait que nous faire pleurer et rire en même temps. Nous pensons que la théorisation du parti (y compris les schémas) est nécessaire et indispensable pour historiciser au niveau du contre-pouvoir et du pouvoir de classe, bien que sous une forme médiate, les différents degrés du contre-pouvoir communiste morcelé dans le prolétariat métropolitain maintenant, et dans la phase de consolidation dans la prise du pouvoir. A notre avis, la controverse sur ces questions doit être développée et il est de notre intérêt primordial qu’elle soit généralisée ; les avant-gardes de la lutte et de la politique dans ce secteur doivent être amenées à la développer, à l’intérieur et à l’extérieur, à la première personne. Cependant, nous sommes optimistes et pleins d’espoir, car les contradictions de la classe (y compris celles de ce secteur) sont dans son accumulation la prémisse pour le dépassement dialectique (saut de qualité) des problèmes existants. Comme toujours, c’est le fusil qui doit devenir l’instrument de la classe et non l’inverse. L’avant-garde politique du prolétariat prisonnier et le prolétariat prisonnier dans son ensemble ont leurs propres temps de croissance ; mais à "gauche" ils n’ont rien à récupérer, parce que leur histoire est une histoire révolutionnaire. La seule erreur à ce stade peut être commise par ceux (et ils la commettent de plusieurs côtés, mais les comptes avec l’histoire sont ouverts) qui, se considérant comme des communistes combattants une fois pour toutes (uniquement parce qu’ils ont fait leur propagande armée), lancent des mots d’ordre tels que : celui qui sabote l’unité entre les camps (une phrase abstraite qui sert à définir ces camarades plus que l’unité) est un contre-révolutionnaire ! Avec ces mots d’ordre on ne peut que construire sur le sable le château de ses propres mauvais choix (mauvais pour soi et non pour la classe, qui de toute façon sait s’approprier dès maintenant le positif de ces mots d’ordre, et des actions militaires qui suivent et/ou suivront). Nous disons que des prolétaires ayant une bonne mémoire historique de leurs luttes et de leur rôle dans la recomposition de la classe sortent, et c’est avec eux que nous devons construire la théorie, le programme et l’organisation révolutionnaire. Le reste suivra. Notre chemin, en tant qu’avant-garde politique de ce secteur de classe, est de ne pas être placés sous hégémonie (tout en cherchant le
positif pour s’y connecter) dans la prochaine période (ceux qui ont des oreilles pour entendre entendent, ceux qui ont des intérêts de classe à défendre doivent les défendre) qui a des intérêts de classe à défendre le mettent en avant de la politique du fusil en premier lieu, mais en prenant soin du processus de croissance de l’autonomie politique pour la construction de l’organisation globale de la classe en premier lieu. Contre la politique de l’auto-isolement ! Contre la stratégie des libérations élitistes ! Pour la stratégie de la libération de classe et de l’auto-libération !".

Suivant : R.C. (air BR), Témoignages successifs sur l’Asinara en 1979