« On se demandera bien sûr si le monde où nous vivons
est vraiment si renversé qu’il faille toujours le remettre sur pied »
...Robert Musil ‘’l’homme sans qualités" Seuil T1 p 47...

A cette demande, nous répondons
« c’est que, ici maintenant, une fois de plus, il le faut bien ! »

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LB., "ASINARA : AUJOURD’HUI COMME HIER = LAGER", FORNELLI, ASINARA, JUIN 1986

lundi 27 décembre 2021

« Au bout de deux ans, nous nous trouvons encore à devoir parler du soi-disant camp de concentration connu sous le nom de Fornelli ; malgré nos diverses protestations rien n’a changé ici, nous soulevons donc cette énième protestation. Nous sommes un groupe de prolétaires enfermés à la section Fornelli de la prison de l’Asinara et nous voulons faire connaître les conditions dans lesquelles nous nous trouvons. Lors du "séquestre d’Urso", elle avait été déclarée inutilisable, mais à ce jour il y a environ 90 détenus et les choses continuent comme hier. A cette époque il y avait une grande promenade avec quelques arbres qui donnait l’impression d’un peu de verdure, mais la direction a pensé que pour les prolétaires ce n’était pas bien (trop d’espace, sic...), alors ils l’ont fermé pour y faire une nouvelle cantine et salle de jeux pour eux (les pauvres !) qui en ont besoin... Maintenant on se retrouve obligés d’aller vers les anciennes passerelles de 12 x 8 m, avec de relatifs filets au-dessus de la tête pour se protéger de la pluie ; bien sûr on y va à pas moins de 40, donc il suffit que 4 ou 5 prolétaires se baladent et que les autres doivent se coller aux murs, donc la plupart préfèrent rester en cellule, renonçant à la sociabilité nécessaire pour échanger entre nous. Les camarades soupçonnent que tout cela a été programmé précisément dans le but de nous isoler, par conséquent chacun de nous adopte des systèmes de lutte personnels mais sans atteindre le but qui serait au contraire obtenu avec l’unité de tous. Il ne faut pas oublier le grave problème de santé, comme nous l’avons déjà traité (voir Bulletin n° 14) ; maintenant, malgré que beaucoup de temps se soit écoulé, les choses sont comme elles étaient alors, voire pire. Mais le problème le plus grave se produit avec l’arrivée dans la section de divers prolétaires avec des peines allant de la réclusion à perpétuité à 30 ans. Maintenant ces prolétaires se retrouvent dans la position de ne pouvoir exercer aucune activité de travail car, selon la Direction, le Ministère les définit comme "très dangereux", donc on leur interdit le travail que d’autres prolétaires effectuent ; comme excuse elle dit qu’ils doivent faire des travaux internes ; le paradoxe, c’est qu’il semble que de tels travaux, il n’y en ait pas. De même, pour les activités récréatives, que la Direction organise de temps en temps, ils en sont interdits sous prétexte qu’ils sont "paresseux", sans considérer qu’ils le sont pour une simple commodité de la gestion de la direction.

Nous nous émerveillons des émissions de télévision où on parle à droite et à gauche de nouvelle sociabilité et ouverture aux problèmes des détenus ; évidemment on se réfère exclusivement aux « dissociés ». Nous qui nous identifions à un prolétariat vivant et combattant aimerions que le docteur Amato vienne entendre nos problèmes et pas qu’il s’arrête seulement à la section centrale mais qu’il allonge son pas jusqu’aux Fornelli.

Étreinte communiste à tous les camarades ».

Le dernier décret pris en application de l’article 90 expire en août 1986 et n’est pas prorogé. Le 10 Octobre 1986 la loi n. 663 de la reforme du Système Pénitentiaire dite Loi Gozzini ", qui entre autres, abroge l’article 90 en le remplaçant par l’article 4l bis et introduit l’art. 14 bis, ci-dessous.

Suivant : QUELQUES ARTICLES DE LA LOI N. 663 DU 10 OCTOBRE 1986.